C'était dans l'air: Denis Ducarme a décidé de s'installer à Charleroi, Ville basse, début octobre.
Un déménagement qui n'est évidemment pas dû à l'amour inconditionnel du très remuant député fédéral MR pour le nouveau visage urbain de la cité sambrienne, ni sa passion transie pour les terrils ou encore sa fantitude extatique des Zèbres de Mehdi Bayat.
Non, si le petit Duc, fils du grand qui a régné sur Thuin de 1988 à 2000, a décidé de poser ses valises Rive gauche (un comble), c'est bien évidemment parce qu'il y a un intérêt politique.
Pour lui d'abord. Après avoir loupé un poste de ministre wallon qu'avait voulu lui fourguer Georges-Louis Bouchez en faisant sauter la pauvre Valérie De Bue (ce qu'un décret wallon l'a finalement empêché de faire), mais surtout après avoir été barré par le même Georges-Louis Bouchez à la présidence du MR, Denis Ducarme s'est un peu retrouvé Gros-Jean comme devant, ratant même le poste de chef de groupe du MR à la chambre au profit du diaphane Benoît Piedboeuf.
C'est dire si le bouillant libéral a les crocs et un esprit revanchard aiguisés. Et Charleroi est donc une opportunité en or de revenir au devant de la scène en tant que leader des Réformateurs dans la plus grande ville de Wallonie.
Mais son arrivée au Pays noir est aussi un bon coup pour son parti. Car il faut bien le constater, depuis quelque temps maintenant, le MR carolo manque cruellement de leadership. En dépit d'un travail sérieux, l'actuel chef de file des libéraux, Nicolas Tzanetatos, n'a jamais vraiment réussi à s'imposer avec charisme. A vrai dire, le départ d'Olivier Chastel pour le Parlement européen, a laissé un certain vide, pour ne pas dire un vide certain chez les Réformateurs.
Or, en rapatriant Denis Ducarme de sa campagne nalinnoise (qu'il avait rejointe en 2017 en provenance de Momignies), le MR fait coup double: il ramène une figure qui va pouvoir tirer les troupes à la fois pour les élections communales, mais peut-être aussi régionales, de 2024. Autant dire que les observateurs se réjouissent déjà des passes d'armes qui se profilent entre Ducarme et Magnette, surtout quand on sait que les thèmes de prédilection du député libéral seront les indépendants, la sécurité...et le social.
Reste que ce type de déménagement pour des raisons purement de stratégie politique plus que par conviction, laissera toujours un goût amer aux vrais municipalistes qui considèrent que la passion pour sa commune doit avant tout être le moteur d'un engagement politique à cet échelon particulier de la vie publique.
Denis Ducarme n'est certes pas le premier. Son papa avait fait pareil en quittant Thuin pour Schaerbeek en 2000. le MR Willy Borsus a quitté sa bonne commune de Somme-Leuze pour Marche. Et le PS Rudy Demotte est parti de Flobecq où il régnait en maître pour tenter l'aventure tournaisienne.
On appelle ça la Realpolitik. Qui peut souvent s'avérer aussi efficace qu'elle est cynique. Mais peut aussi parfois mener à de terribles fiascos.