"Historique" est un mot souvent galvaudé. Mais ne pas l'employer au sortir d'un week-end incroyable pour Charleroi serait une erreur elle-même historique.
Reprenons dans l'ordre.
L'inauguration du Campus UCharleroi vendredi soir a été marquante à plus d'un titre. Voir, enfin, un vrai projet universitaire où ULB, UMons, Haute Ecole Provinciale et Université Ouverte sont parvenues à s'entendre pour créer un pôle permettant désormais aux jeunes Carolos de se lancer dans des études supérieures à deux pas de chez eux, avait quelque chose d'émouvant.
Les centaines de personnes présentes à l'inauguration dans le magnifique bâtiment Zénobe Gramme, historique lui aussi, de l'Université du Travail créée il y a plus de 100 ans par Paul Pastur, ne s'y sont pas trompées. Académiques, étudiants, politiques ou simples citoyens, ont senti que le moment était unique. Tout comme le discours de Paul Magnette que Jean Jaurès n'aurait pas renié. La comparaison peut paraître exagérée. Elle a pourtant tout son sens tant certaines envolées étaient galvanisantes et sincères. Un discours rare, tourné vers les gens, vers la jeunesse, vers l'espoir de lendemains meilleurs pour une ville et sa population qui, comme on dit ici, "n'ont pas toujours facile".
Et puis il y a les travaux de la Ville haute, bien sûr. Un cadre de vie complètement rénové qui va apporter plus de sécurité, plus de lien social, une mobilité plus fluide, non seulement pour les habitants, les commerçants, pour les milliers d'étudiants qui débarqueront bientôt, mais aussi pour tout un bassin de vie qui vient à Charleroi fréquenter ses magasins, ses restos, ses lieux de culture.
Là aussi, l'inauguration de la Place du Manège et de la Place Vauban aura montré combien Charleroi a changé en 10 ans, pour redevenir une ville conviviale, tournée vers son futur. Le sourire des milliers de gens qui ont fait la fête pendant 3 jours dans le cadre des Fêtes de Wallonie et sous un soleil radieux, en disait d'ailleurs long sur la fierté et le soulagement de toute une population d'assister à une renaissance prometteuse.
Formation, urbanisme, redressement socio-économique: en 15 ans, c'est le visage de toute une métropole qui a muté. Grincheux, trolls des réseaux ou râleurs perpétuels peuvent dire et écrire ce qu'ils veulent: Charleroi est de retour et son image aussi.
Le tout, désormais, est évidemment de ne pas tomber dans l'angélisme béat.
Non, tout n'est pas parfait parce que Charleroi possède un campus universitaire et deux magnifiques places. Le combat pour la formation dans une ville où le chômage continue à faire des ravages et où la main d'œuvre est peu qualifiée, ne fait que commencer.
La Ville va devoir continuer son combat pour que le sentiment d'insécurité disparaisse, notamment en luttant contre la toxicomanie, contre la pauvreté, en travaillant sans cesse sur la mobilité, l'environnement, la qualité de vie. Il faudra aussi mettre les moyens pour entretenir les espaces urbains rénovés.
Le boulot ne fait que commencer. Et la tâche est immense. Mais elle n'incombe pas qu'aux autorités communales. Elle est aussi - et peut-être surtout - du ressort des Carolos eux-mêmes qui, s'ils veulent rester fiers de leur Ville, doivent se comporter de manière responsable et contribuer à l'effort pour que Charleroi gomme définitivement son image détériorée, même si souvent injuste, de ville sinistrée à tous égards.
La chance est unique. Il faut la saisir en se réappropriant la métropole. L'avenir est à ce prix. Il sera radieux et historique comme ce magnifique week-end. Si on s'y met tous.
Martial Dumont