Edito: Fait d'hiver: le Père Noël assassine Saint-Nicolas

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Edito: Fait d'hiver: le Père Noël assassine Saint-Nicolas

Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais cette année Saint-Nicolas est passé au bleu. À quelques heures de son passage théorique chez les enfants sages (ou pas), on en entend à peine parler. Il a du mal à quitter son trône, son âne est déjà parti voir s'il ne pouvait pas se recycler dans une crèche, et le Père Fouettard est sans doute resté coincé dans une cheminée.

Sans doute son absence dans les magasins et les esprits est-elle en partie due à ses premières apparitions alors même que l'été n'était pas fini. Vous me direz que cela fait des années que cela dure, et que ça n'empêchait pas, jusque-là, que l'homme à la grande mitre continue à être la star du 6 décembre.
 
Mais cette année, on a clairement senti la bascule, que ce soit sur le plan commercial ou simplement de l'intérêt des enfants et des parents.
 
La raison est double. D'une part, le Black Friday de fin novembre a littéralement tout emporté sur son passage, vidant notamment les poches de beaucoup. Dans une période compliquée sur le plan du pouvoir d'achat, certains choix s'opèrent...
Et puis, il y a cette arrivée en force, de plus en plus tôt, de la fameuse « magie de Noël ». Imaginez: deux semaines avant la Saint-Nicolas étaient inaugurés les premiers marchés de Noël. Ça sent le vin chaud jusqu'à saturation, et les illuminations sont déjà partout depuis belle lurette, y compris sur les devantures des maisons. Dans ces conditions, impossible pour le Grand Saint de se faire respecter et de garder la place qu'il a toujours occupée dans le calendrier et surtout dans la tête des petits et des grands.
 
Il s'agit là d'un vrai problème. Non parce qu'il s'agirait, au nom d'une idéologie de boomer, de dire que c'était mieux avant et que les traditions se perdent au profit du commerce. Mais simplement pour une question de rythme dont tous les humains ont besoin comme de pain. Comme ils ont besoin des saisons qui assurent le tempo de leur vie tout au long de l'année.
 
Dans l'inconscient collectif, la Saint-Nicolas annonce pour tous le passage vers l'hiver. Pour les élèves, c'est aussi celle des examens de fin d'années. Pour les étudiants du supérieur, elle sonne l'heure de la fin des guindailles et la nécessité de s'y mettre pour ne pas s'assurer un blocus de galère pendant les fêtes de fin d'année.
 
Bref, le 6 décembre c'est un repère temporel qui, aujourd'hui, est en train de disparaître peu à peu en même temps qu'une vraie spécificité culturelle belge. Et dans un monde qui a pourtant plus que jamais besoin de pouvoir s'ancrer dans le temps, l'assassinat à feu lent de Saint-Nicolas est un fait d'hiver dramatique.


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