Il y a 20 ans, Splintex à Fleurus, perdait un tiers de ses travailleurs. Une restructuration hors norme, qui a soulevé la colère des travailleurs. La grève durera 3 mois et demi. Pippo Bordenga, président de la délégation syndicale à l'époque se souvient.
Les images de 2004 sont toujours aussi émouvantes et éprouvantes. Le conflit syndical qui va secouer l’entreprise Splintex est d’une rare violence. Il faut dire que le coup porté par la direction est terrible : 284 emplois sur 844 sont menacés, un tiers des travailleurs. Tony Marzola, le délégué CSC de l’époque, n’en revient pas : « Les gens sont plus que outrés de la manière de faire de la direction », et Robert Wathy, permanent CSC, d’enchaîner : « En 20 ans de carrière, je n’ai jamais vu ça. » Chaque travailleur a été prévenu par courrier. Les responsables avaient fait des stocks et s’étaient bien préparés.
La réaction des travailleurs ne s’est pas fait attendre, et le 2 décembre 2004, précisément, débutait à Fleurus un conflit syndical qui allait durer trois mois et demi. Un mouvement de grève hors norme. Cette entreprise, c’est Splintex.
Splintex : Une entreprise verrière spécialisée
Pippo Bordenga y travaillait : « C’est une entreprise verrière, avec la particularité de traiter uniquement le vitrage automobile. » Une entreprise encore florissante à la fin des années 2000, Splintex commence sa descente aux enfers en 2003 lorsque le groupe Glaverbel cède sa branche fleurusienne aux Japonais d’ASAI Glass.
Un conflit social marqué par des actions fortes
Suite à un conseil d’entreprise extraordinaire, les syndicats apprennent la mauvaise nouvelle, une décision de la direction japonaise qui a d’autres ambitions pour Fleurus. Pippo Bordenga, président de la délégation syndicale de l’époque, se souvient de ce combat hors normes. Un combat contre la mondialisation qui a débuté par la séquestration d’une partie de l’équipe de direction. « Cela a été improvisé, mais pour nous, ce n’était pas une séquestration, c’était un refus du plan et une invitation à la direction de réfléchir à une alternative. On a vécu un truc hors normes et on a géré comme on a pu. » L’ancien délégué est fier de n’avoir pas failli à sa parole : « Qui consistait à dire que les accords seraient pris uniquement à la majorité de l’assemblée générale, et c’est ce que l’on a fait jusqu’à la fin. »
La fin de Splintex : un bastion perdu
Aujourd’hui, l’entreprise n’existe plus, les Japonais ont cessé les activités sur le site. Seule une centaine d’ouvriers ont été repris par Walglass, un sous-traitant sur le site. « Si on veut parler de ressources humaines, de travailleurs dans la région, c’est un regret d’avoir perdu un bastion pareil. Comme je disais, 1 200 travailleurs il y a à peine 20 ans, uniquement à Fleurus, voilà... » Ils ne sont plus là.
Une aventure humaine inoubliable
Les anciens de Splintex, eux, sont toujours là, et ils ont voulu marquer le coup des 20 ans ! Se retrouver ! Car au-delà du conflit, Splintex, c’est une aventure humaine inédite, une entreprise où le sentiment d’appartenir à une famille de travailleurs était encore présent. « Il y a le conflit, mais avant le conflit, pendant 20-30 ans pour certains, c’étaient des collègues de travail, et donc forcément il y a des relations qui se créent, donc le conflit a en plus resserré les liens entre certaines personnes. La volonté de se revoir est toujours présente. Aujourd’hui, c’est une rencontre conviviale, on n’a pas l’intention de brûler des palettes mais peut-être manger quelques brochettes et se remémorer des souvenirs ensemble. »
Au-delà des souvenirs, il reste de cette époque des documents, des images, des photos que Pippo rêve, un jour, pourquoi pas, de compiler dans un livre afin que la vérité ne se perde pas.