Les activités publiques de Charleroi Danses ont été suspendues et comme tous les lieux culturels, le centre chorégraphique de la Fédération wallonie Bruxelles a dû se mettre au ralenti, mais son coeur n’a jamais cessé de battre. Pour Annie Bozzini, la directrice de Charleroi Danses, la vie continue, elle est très sereine et le seul confinement qui l’inquiète est celui du public.
Pour faire le point sur la situation de Charleroi Danse, nous avons pu joindre Annie Bozzini, la directrice du centre chorégraphique par téléphone. Alors que nous entrons dans la troisième phase de déconfinement, et notamment celui de la culture, nous voilà bien étonné d’apprendre que
« Nous sommes déjà déconfinés depuis pas mal de temps. Nous travaillons dans des bureaux très spacieux donc il n’y a pas de danger. Nous suivons les prescriptions de sécurité. Mais moi, je crois en la puissance du collectif, nous ne pouvions pas faire autrement. »
Ceci explique sans doute cela, lorsque l'on voit le foisonnement d’idées et de vidéos notammnet lancées sur Facebook et instagram notamment. Très tôt, Charleroi danse a proposé à ses artistes de réaliser des vidéos pour maintenir ce lien essentiel avec le public.
ce qui a donné lieu, parmi une quarantaine de propositions, à de petites pépites comme la belle chorégraphie de Ikue Nakagawa
Reprise des répétitions
Mais au-delà du virtuel, les artistes avaient un grand besoin de répétitions. C’est donc par « silo » comme le dit Annie Bozzini que les studios ont été petit à petit déconfinés.
« Nous avons commencé les répétitions avec l’accueil des gens qui travaillaient seuls. Nous leur avons fourni un studio avec l’obligation d’être seul et ne pas passer par les bureaux, ça leur a permis de continuer à travailler et à créer. Ensuite, nous avons ouvert la porte aux couples. Dans une prochaine phase nous allons tenter d’accueillir à nouveau les compagnies. C’est un peu plus compliqué. Il faut prendre plus de précautions, les studios sont des lieux fermés mais il est difficile d’éviter la proximité en danse et donc pour l’instant les groupes travaillent à la table, comme on dit. Nous leur offrons les espaces nécessaires pour le faire puisque nous avons de la chance de les avoir, ces espaces. »
Florencia Demestri et Samuel Lefeuvre font partie de ces artistes chanceux qui peuvent travailler dans les installations de Charleroi Danse. Ils nous racontent leur confinement en duo.
« On a eu très peu de perspectives pendant longtemps, c’était assez compliqué. C’est pas encore hyper clair mais les choses se rouvrent donc c’est bien. Il y a eu une dynamique à trouver aussi à la maison, avec notre petite fille d'un an et demi, pour arriver à s’entrainer. Il y a des spectacles qui s’annulent, des opportunités qui sont reportées et qui bousculent l’agenda sur une année en fait. »
Florencia et Samuel prépare actuellement un projet qui sera présenté à Bordeaux en janvier de l'année prochaine. Mais avant cela, Charleroi Danse a pris l'initiative d'ouvrir ses installations au public dès le mois de juillet, le duo sera présent.
"Le projet pour Bordeaux est très frais, on va s'en inspirer mais pour notre prochaine prestation à Charleroi Danse, en juillet, nous allons plus nous inspirer du confinement. De l'idée que justement pour pallier cette obligation de distance de la plupart des gens, le fait que l'on soit en couple, on peut travailler autrement donc on se concentre là dessus, sans entrer dans un truc trop personnel mais montrer comment nous sommes ensemble sur scène."
Le confinement a donc inspiré ces deux artistes. Ils trouvent même indispensable de se l'approprier pour en tirer sinon une leçon en tout cas un regard. Samuel est en tout cas ravi de pouvoir retrouver très vite le public.
"Nous sommes restés en contact avec les vidéos proposées par les artistes sur la page facebook de Charleroi Danse, mais oui retrouver le public, le moment présent partagé, c'est vraiment important."
Vous étiez confinés au printemps et bien dansez maintenant
Florencia Demestri & Samuel Lefeuvre, font partie des danseurs qui préparent un évènement dans les espaces extérieurs (tant aux Ecuries que sur le site bruxellois de la Raffinerie), de Charleroi Danse.
Du 2 au 5 juillet, ils seront une centaine de danseurs à proposer des spectacles gratuits mais pour lesquels il faudra réserver bien sûr. Les consignes sanitaires seront également de mise pour accueillir à Charleroi une cinquantaine de personnes et à Bruxelles une centaine.
Parmi les artistes, le public retrouvera aussi :
- Le travail des chorégraphes en résidence : Louise Vanneste, Ayelen Parolin, Boris Charmatz, Lara Barsacq et Julien Carlier + Mauro Paccagnella qui travaille sur les questions de territoire à Charleroi. Tous vont revisiter leur répertoire ou utiliser la matière de leur création à venir
- Il y aura aussi 7 autres couples qui ont vécu le confinement en duo :
Sidonie Duret & Djino Alolo Sabin / Eléonore Valère & Anton Lachky / Mercedes Dassy & Tom Adjibi / Marion Sage & Anne Lepère / Angela Rabaglio & Micael Florentz / Jeanne Colin & Killian Madelaine / Mat Voorter & David Zambrano
Diverses propositions seront faites au public aussi pour renouer le contact, il y aura par exemple une playlist créée par le public et sur laquelle les artistes improviseront, il y aura aussi d’autres des propositions participatives : le projet Levée de Boris Charmatz avec des enfants / un projet de choral de Lara Barsacq pour les danseurs participants / un projet sur le pas Madison pour le public, dansé sur le boulevard Mayence et ses lignes de places de parking encore « sous réserve des autorisations » par les autorité de la ville / un projet de danse à deux pour les couples.
4 jours de spectacles dont le programme n'est pas encore entièrement bouclé, mais que le public se rassure, les informations seron bientôt disponibles et annoncées via les réseaux sociaux et la page Facebook de l’institution.
« Les artistes sont tellement heureux de reprendre le travail que ça va être vachement bien, s’enthousiasme déjà Annie Bozzini. La notion de regard est absente chez nous et chez les artistes depuis très longtemps. Notre ambition n’est pas de remplir les salle, mais de permettre au public de se nettoyer l’Iris. »
Il est vrai que depuis trois mois, les écrans ont tout remplacé.
La sérénité du service public
Le travail a continué à Charleroi Danse depuis trois mois, et cela pour le public, c’est le vrai et le seul crédo de la directrice qui est beaucoup plus sereine que ces autres camarades de la culture.
« Nous n’avons pas la même perception des choses, on a mis mes camarades de la culture dans une forme d’obligation de rentabilité que je n’ai pas. Dès le départ, j’ai voulu rester dans une notion de service public, nous offrons des services, nous sommes un centre chorégraphique, on ne vit pas de nos recettes propres, on n’est pas sur le même rapport à la culture. J’ai toujours voulu rester sur des taux d’autofinancement les plus réduits possible. Bref, je prêche vraiment pour un service public, la privatisation est une vraie erreur. »
Pour Annie Bozzini c’est clair la culture n’est pas rentable un point c’est tout ! Mais ce n’est pas pour autant qu’il ne faut pas gérer, elle a mis un point d’honneur à assumer les charges salariales de la 40aine d’employés et techniciens qui l’entoure. C’est une question de responsabilités.