À Auvelais, depuis le 18 novembre, le collège Saint-André se prépare à la rentrée scolaire de 2023. Et pour cause, l’institution se lance avec l’EPSIS Claire d’Assise, un centre d’enseignement spécialisé, dans l’aventure des classes inclusives. Si, en Fédération Wallonie Bruxelles, une vingtaine de classes de ce type sont déjà accessibles dans le primaire, c’est la première fois qu'une expérience de ce type est menée au niveau secondaire.
Vous connaissez probablement Luther, Hugo et leurs mamans. Deux battantes qui ont tout mis en oeuvre pour que leurs fils aient droit à un enseignement de qualité.
Luther est porteur de trisomie 21 et Hugo a été victime d’un manque d’oxygénation à la naissance. Depuis 2016, nous suivons régulièrement sur Télésambre, les aventures scolaires de ces deux enfants, mais quatre ans, ils ont bien grandi.
« Luther va avoir 12 ans dans quelques jours, Hugo a 11 ans. L'expérience que nous avons vécue avec cette diversité scolaire, il ne fallait pas qu’elle s’arrête. Ce qui est intéressant pour cette nouvelle aventure, c’est que nous sommes tombés sur des partenaires très motivés, le collège Saint-André à Auvelais et le centre scolaire Claire d’Assise à Bouges. Le principal, c’est que l’inclusion ne soit pas que de façade. »
Car pour les deux ados, désormais, l’aventure des classes inclusives continue.
C’est donc le collège Saint-André à Auvelais qui accueillera cette classe intégrée, l’établissement a rapidement été séduit par l’idée. C’est Mélissa Penserini, cheffe d’atelier, qui porte le projet.
« Notre école offre plusieurs sections qualifiantes, avec des options qui sont déjà en contact avec des personnes extraordinaires, c’est aussi ce qui faisait que c’était l’endroit idéal. »
La classe implantée au collège Saint-André, sera gérée par le personnel de l’EPSIS, l’ Enseignement Professionnel Secondaire Inférieur Spécialisé, Claire d’Assise à Bouges. Didier Tierens, son directeur, ne s’est pas fait prier. Un projet comme celui-là amené sur un plateau ne pouvait se refuser.
« L’école partenaire c’est vraiment l’élément primordial. Une école prête à accueillir nos enfants, c’est une grande chance. Le collège Saint-André offre aussi des possibilités d’inclusion pour le futur plus importantes. »
Un projet à construire
Des doutes subsistent sur le projet. Comment vont réagir les adolescents du collège ? Comment développer ces moments de rencontre entre les jeunes de l’école, entre les classes et durant les activités extrascolaires ? Des questions qui ouvrent néanmoins sur un champ des possibles très large.
Coralie Caes, la maman d’Hugo est très motivée.
« C’est un concept qui n’existe pas, mais au niveau de la communication on ne sait pas sur quoi ça va déboucher. Nous nous sommes pleines d’enthousiasme, comme pour le primaire, on y croit et ce n’est que le début. »
La classe est officiellement ouverte, les démarches administrative date de novembre dernier, et elle pourra accueillir 7 ados, actuellement ils sont 3 inscrits. Carmela, la maman de Luther, lance donc un appel aux parents qui souhaitent sortir des sentiers battus.
« Hugo, luther et Tiana sont partants, mais il reste de la place. Ce système fait peur évidemment, c’est un super projet mais on est très enthousiastes même si nos coeurs de maman ont peur parce que l’adolescence, en plus, n’est pas un moment facile. Mais quand on voit l’accueil à la fois du collège et du centre éducatif, voire même des élèves qui ont hâte de rencontrer nos enfants, ça réchauffe le coeur. On peut comprendre les craintes des autres parents, mais nous sommes certaines que nous allons y arriver. »
Des freins et de bonnes raisons de ne pas y aller
Les deux mamans ne sont jamais à bout d’arguments, mais elles se retrouvent confrontées à la peur. La peur des moqueries, la peur de devoir s’investir encore et encore.
Carmela se veut rassurante et croit à la complémentarité des systèmes d’éducation.
« On n’est pas en train de mettre les systèmes que l’on porte en concurrence. Il s’agit d’une approche complémentaire et chaque parent choisi en fonction de ce qui est meilleur pour son enfant. Nous, pour le projet de vie que nous souhaitons pour nos enfants, nous ne souhaitions ni l’inclusion complète, ni l’enseignement spécialisé. Nous voulons aussi qu’il reste dans leur bassin de vie, proche de chez eux et de leurs familles. »
Didier Tierens, ne voit que des avantages dans cette aventure qui commencera bientôt. Le seul bémol sera, comme toujours, administratif avec la gestion à distance des élèves et du personnel.
« L’avantage de l’inclusion c’est qu’elle permet de changer le regard sur l’autre. Que ce soit pour l’ordinaire ou l’extraordinaire. C’est encore difficile pour l’ordinaire d’avoir un regard positif sur le spécialisé. notre système permet d’aller vers une société plus inclusive de manière générale. »
Mélissa Penserini, du collège Saint-André, y voit surtout une manière de mettre concrètement en pratique le projet pédagogique de l’école, le projet a d’ailleurs été particulièrement bien accepté par les professeurs.
« Notre but est de mettre l’élève, tous les élèves, au centre de nos préoccupations. Les élèves de notre école vont s’enrichir comme les personnes qui présentent un handicap seront stimulées. Nous formons les citoyens de demain et donc nous voulons aller vers une société plus ouverte et plus tolérante. »
Tous pareils, tous différents
En 2016, les classes inclusives étaient encore l’exception. Aujourd’hui, il y en a une vingtaine en FWB. Le système est encouragé par l’administration et la ministre de l’enseignement.
Les deux mamans, qui travaillent désormais main dans la main, veulent surtout donner toutes les chances de réussite à leurs enfants. Et tant pis si on se moque un peu de leur façon d’être, entre ados, on ne se fait pas de cadeau.
Mais la vie c’est ça aussi. D’où que l’on se place, nous sommes tous pareils et à la fois tous différents.
Le combat de Carmela et de Coralie a porté ses fruits quoique l’on en dise. La rentrée 2023 sera marquée par l’ouverture d’une nouvelle classe intégrée à Auvelais, mais aussi dans d’autres régions comme à Mons et Namur. La preuve s’il en fallait une qu’il faut toujours pouvoir rêver et rêver grand !
Voir ou revoir sur le même sujet : les premiers pas de Luther au sein de son école inclusive, Saint Paul à Mont-sur-Marchienne :
L.E.