3000 !
Beau palmarès pour ce tueur invisible qu’est le Coronavirus.
Alors voilà ! votre billet commence comme ça, me direz-vous ?
Oui ! parce que mon humeur aujourd’hui est celle-là, un peu à l’image de l’ambiance du moment, hésitant entre le soulagement qu’offre un ciel si bleu et la tristesse à certains moments de ne plus pouvoir discerner.
Discerner : Se rendre compte de la nature, de la valeur de (qqch.) ; faire la distinction entre (des choses mêlées, confondues).
Entre les chiffres qui tombent chaque jour, la barre significative de ces 3000 décès dépassée aujourd’hui, entre les courbes que l’on aimerait tellement voir descendre enfin, et ce qu’il se cache derrière tout cela, il est désormais difficile de faire la part des choses.
Il n’y a pas que les morts, il y a aussi les nouveaux cas de contamination 1.684 depuis hier.
915 (54 %) en Flandre, et certains ne pensent qu’à aller faire du shopping en Hollande ;
570 (34 %) en Wallonie, et le week-end dernier on n’a entendu parler que de barbecues
et 178 (11 %) à Bruxelles et l’on invoque la qualité de l’air.
Voulons-nous simplement nous changer les idées ou effacer cette réalité ? Derrière les chiffres quels qu’ils soient, il y a des personnes et derrière certains comportements, une forme d’indécence.
Ok nous avons tous besoin de respirer si nous ne voulons pas devenir fou !
Disons alors que ça c’est mon sentiment, et je ne me veux pas péremptoire, je ne veux pas faire partie des cons vides de 2020, la formule n’est pas de moi, mais de l’humoriste Michael Hirsch.
Notre cerveau parvient-il encore à percevoir, la souffrance de ceux qui s’en vont hommes, femmes et parfois enfants ou ados ? Pouvons-nous encore imaginer le chagrin des familles endeuillées et le malheur de nos aînés ? Ces fameuses personnes à haut risque, qui doivent se sentir tellement abandonnées dans leurs mouroirs.
Car oui, désolée de casser l’ambiance, mais il m’arrive souvent de penser à elles. A la disparition de ces deux professeurs de l’IND Loverval, pour qui les témoignages affluent mais qui n’auront pas ces obsèques bien méritées. A l’acte héroïque de cette vieille dame qui a laissé son respirateur à un plus jeune parce qu’elle estimait avoir bien vécu. Mais je pense aussi à tous ceux qui aujourd’hui attendent de savoir à qui sera le tour.
Les autorités sont formelles « Pas question de refuser l’hospitalisation à qui que ce soit, il y a suffisamment de places, même aux octogénaires ou au nonagénaires. La décision d'hospitalisation est prise en concertation entre la famille, les pensionnaires et les médecins. » La réalité est plus complexe, on s’en doute. Et on nous le dit du bout des lèvres, les décisions sont éthiques et déontologiques… sans plus ?
On entend aussi vos cris sur les réseaux sociaux : « qu’attend-on ? ils ne sont pas prioritaires ? on les juge inutiles à la société ? »
Il aurait fallu les tester plus précocement, de manière généralisée, car plus tôt détecté, plus vite disparu le virus ! Mais non, les autorités étaient empêtrées entre des chiffres, des tests et des masques qui n’arrivaient pas, sans oublier de continuer à se déchirer sur fond de guerres communautaires.
Pourquoi les maisons de repos et leurs pensionnaires que depuis de la crise, tout le monde savait sensibles, n’ont-ils pas été protégés ? Pourquoi n'ont-ils pas été une priorité ? pourquoi les personnes âgées n’ont-elles pas été testées ? Ce sont des questions qui viendront après sans doute, mais eux ne seront plus là pour entendre les réponses.
La tâche était énorme je n’en disconviens pas, mais au final, cela n’est-il pas révélateur de la valeur et de la place que nous donnons à chacun dans notre société ?
Une société où il faut foutre la paix aux enfants qui ne vont pas à l’école pendant le confinement parait-il. Une société où le jeunisme est roi. Une société où certains disent n’avoir rien craindre sans lever le petit doigt. Une société dans laquelle l’e-apéro est une priorité ainsi que le sacro-saint premier BBQ de l’année. Une société qui réapprend l’humanité à ses dépens. Une société où certains n’ont toujours pas compris que la « gripette » est plus mortelle que prévu.
Nous sommes en guerre contre le virus, et dans chaque guerre il y a des victimes collatérales à pleurer certes, mais je ne voudrais pas avoir 80 ans aujourd’hui et devoir me dire que je vis dans une société qui m’abandonne. Face à la mort et à la souffrance quel que soit l’âge croyez-moi on n’est jamais prêts. Nous avons tous envie de déclarer « je serais bien restée encore un peu»* car comme le dit Charlotte Gainsbourg, on s'est quand même bien marrés... A méditer
* interprétation d’un extrait du livre "le schmock" de Franz-Olivier Giesbert dans lequel l’un des personnages mourant dit « je serai bien resté encore un peu"