Je fais désormais partie des joyeux « juilletistes », ceux qui rentrent au boulot début août, après quelques semaines de congé. Durant cette période, il faut bien avouer que je me suis moi-même infligée un éloignement salutaire de tous sites d’information. Pourtant, impossible d’échapper à ce satané virus.
Les lundis au soleil, c’est fini et si l’information n’était pas mon métier, comme d’autres, j’aimerais pouvoir crier « On en a marre du ou de la (c’est encore plus moche) Covid-19 ! ». Je ne suis pas seule dans cette galère, dixit la représentante du SPF Santé public ce matin : « Beaucoup en ont assez du coronavirus, Il y a une tendance à chercher les coupables et critiquer toutes les mesures prises, certains fatigués des mesures en viennent à douter de la dissémination du virus et de la gravité de l’infection. De nombreuses idées fausses circulent et la théorie du complot vit de belles heures. »
J’ajouterais que notre travail de journaliste est sujet à toutes formes de commentaires et de critiques. Si, si, à peine mon premier article posté ce matin déjà les premiers râleurs débarquent. Je n'ai pas donné une information complète, les chiffres non plus ne sont pas bon et j'en passe... Nous ne sommes pas assez ou beaucoup trop, nous ne donnons pas de chiffres objectifs mais ceux qui nous arrangent parait-il, ceux qui font PEUR !!! Nous sommes à la solde de l’Etat ou contre lui.
Nous sommes surtout, je pense, les boucs émissaires de ceux qui font de la critique quand ils ne peuvent faire de l'art, de même qu’ils se mettraient mouchard quand ils ne pourraient pas être soldat, comme dirait Gustave Flaubert.
Mais je ne suis pas là pour me plaindre, ni pour faire la moral, alors, je vais vous raconter une petite histoire.
Il était une fois, dans un pays aux conditions climatiques modérées, une tribu de moustiques plutôt conviviale et joyeuse qui vivait paisiblement. Un jour, une minuscule araignée débarqua d’un cageot de tomates tout droit venu d’Afrique. Cette araignée tissa sa toile tant et si bien que les premiers moustiques, les plus fragiles commencèrent à se prendre dedans et moururent. La grande communauté des insectes suceurs de sang se réunit alors et sous la conduite de leurs chefs décida que chacun resterait positionné sur les surfaces planes comme les plafonds et les murs, évitant les coins et les femelles ne sortant que pour aller se rassasier de sang frais nécessaire à la ponte. Tout le monde semblait d’accord. Sauf… quelques suceurs particulièrement assoiffés qui en toute liberté voulaient voler. Ils crièrent au scandale sur la toile. Ils dénoncèrent ces chefs inconscients ne visant qu’à les ankyloser et détruire leur communauté. Il fallait au lieu de se confiner voler serrés.
Pourtant, après quelques jours, les petites araignées affamées finirent par se fatiguer et leurs pièges disparaissaient. Les moustiques alors démasqués, relâchèrent une stratégie qui avait apparemment fait son effet. A la surprise générale, ceux-là mêmes qui n’avaient pas voulu s’arrêter, trouvèrent un mur pour définitivement s’y poser, ils voulaient à présent se protéger, protéger leurs enfants. Ils voyaient aussi dans ce nouveau mot d’ordre une volonté au mieux de les enfumer au pire de les disparition. « Il faut un traitement plus efficace » dirent-ils en coeur.
Les chefs se réunirent donc à nouveau et considérèrent cette protestation, mais rien n’était jamais suffisant pour ces moustiques réfractaires. Il y avait bien une solution, que chacun se suive à la trace. D’autres se levèrent alors, criant au scandale. Comment pouvait-on les empêcher à ce point de tourner en rond en toute liberté ? Tant que la petite araignée ne serait pas éradiquée, point de salut pour les diptères. Les réfractaires de la première heure y trouvèrent aussi à redire : à qui allait profiter l’éradication ? Ne s’agissait-il pas là d’une manoeuvre de soumission ultime. Seuls les plus puissants d’entre eux pourraient tirer parti de cette situation désastreuses disaient-ils. Comment ? Ils ne le savaient pas.
Et puis un jour, la petite araignée fatiguée d’entendre les 2.000 battements d’ailes de moustique par seconde, plia bagages et alla s’installer dans des contrées plus chaudes, plus hospitalières et nourricières. La vie des moustiques reprit son cours et chacun trouva encore à y redire. Certains regrettèrent la crise passée et le nouvel ordre établi, d’autres n’avaient rien changé à leurs habitudes d’antan, d’autres enfin comprirent qu’afin de changer leur communauté hématophage, ils devaient eux-même se transformer. Arrêter de fourrer leur dard n’importe où, faire de leur mieux pour protéger les plus faibles, respecter les consignes pour le plus grand nombre, même si parfois ils n’étaient pas tout à fait d’accord. Après tout, ce n’était pas si compliqué. Et puis au final, si les chefs se trompent ils le sauraient toujours assez tôt et ils pourraient leur demander de s’expliquer et peut-être leur diraient-ils qu'ils avaient eux aussi un peu paniqué. Mais surtout, ceux qui voulaient changer leur monde, se dirent qu’ils allaient de temps en temps se mettre à la place des autres et développer cet esprit critique dont ils avaient tant entendu parler chez les humains qu’ils se plaisaient tant à piquer.
Moralité (quand même !) : Bulles sociales, masques, vaccin, traçage et grand complot, on peut tout juger, tout critiquer. Après tout l’homme est un animal pensant. Mais de grâce arrêtons de nous écharper. Puisque comme le dit si bien Paul Valéry : « Il y a des critiques qui ne demeurent "critique" que le temps de n'avoir pas réfléchi. », et puis, vous ne serez sans doute pas le premier imbécile à avoir changé d’avis.