Le développement l'Intelligence Artificielle (IA) touche tous les secteurs et évolue très rapidement. Dans certains cas, l'IA peut être d'une aide très précieuse, notamment dans le domaine de la médecine.
La Grand Hôpital de Charleroi est la première structure de soins en Wallonie a avoir créé, en avril dernier, un laboratoire de recherche médicale axé sur l’Intelligence Artificielle.
Actuellement, l’activité innovante de ce laboratoire se concentre notamment sur le traitement des lymphomes B diffus à grandes cellules. C’est le type de cancer du système lymphatique le plus courant, et aussi, le plus agressif.
Le Docteur Marie Detrait développe depuis quelques années au Grand Hôpital de Charleroi, des solutions d’intelligence artificielle sur mesure en fonction de problématiques médicales que lui soumettent les médecins. Sa fonction est donc un trait d'union entre la médecine et la technologie.
« C’est un véritable partenariat : l’IA apprend sur des observations et on doit donc lui apporter des données d’apprentissage. Dans ce travail pour ce type de lymphome, 130 cas ont été analysés entre 2017 et 2022. Beaucoup de caractéristiques ont été extraites pour obtenir le profil des patients et de la maladie, de la découverte du cancer aux comorbidités (les maladies déjà présentes au moment du diagnostic). J’ai programmé et testé 5 algorithmes et le meilleur, celui qui a été retenu pour la suite, donne d’excellents résultats, ce qui m’a conduit à la publication d’un article scientifique. Un modèle d’explicabilité des décisions de l’IA a également été implémenté par mes soins afin d’obtenir plus de clarté pour les utilisateurs. Maintenant, nous allons rentrer dans la phase prospective de l’étude, c’est-à-dire que nous allons le tester dans la vie réelle avec les nouveaux cas diagnostiqués à partir de maintenant dans le service d’hématologie ». L’étude prospective se terminera dans 3 ans et une analyse intermédiaire est prévue en juin 2025.
Un outil précieux pour la prise de décision
Le Docteur Delphine Pranger, hématologue et spécialiste de ce type de lymphome au Grand Hôpital de Charleroi est enthousiaste face à cette nouvelle avancée car il n’existe pas actuellement de modèle prédictif dans ce domaine.
« Lorsque je rencontre certains patients, j’ai régulièrement des « intuitions » par rapport à la résistance de la maladie à une chimiothérapie de 1ère ligne mais je suis vraiment heureuse de pouvoir m’appuyer sur les résultats de cet algorithme pour valider scientifiquement mes intuitions ».
Il ne s’agit donc pas de remplacer le médecin mais de lui proposer une aide à la prise de décision. Car l’IA ne dit pas « oui » ou « non », elle présente ses résultats sous forme d’un pourcentage qui correspond à une probabilité, en justifiant les raisons pour lesquelles elle penche ou pas vers une maladie réfractaire (c’est le modèle d’explicabilité de l’IA qui permet cela). Au médecin alors de faire les conclusions qui s’imposent.
Cet algorithme se base sur de nombreuses données encodées au préalable et même, dans ce cas, des données spécifiques à la région de Charleroi. Ce modèle prédictif va encore être testé durant deux ans avec la collaboration de patients qui ont donné leur consentement pour participer au projet. Il sera ensuite mis en service pour le plus grand nombre, en 2027.
Le travail mené par le docteur Marie Detrait intéresse déjà d’autres services du Grand Hôpital de Charleroi comme la gériatrie, qui souhaite aussi travailler à l’avenir avec ce nouveau support prédictif.