Le Parlement a voté vendredi, la loi #Stopféminicide après un dernier débat auquel ont assisté de nombreuses associations qui ont suivi et soutenu les travaux sur le texte. Il s’agit d’une première européenne et d’un tournant historique dans la lutte contre les violences de genre en Belgique. C’est le fruit d’un travail étroit mené en collaboration entre la Secrétaire d’Etat à l’Egalité des genres Marie-Colline Leroy et sa prédécesseure Sarah Schlitz, le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne et la ministre de l’Intérieur Annelies Verlinden en concertation avec les actrices et acteurs de terrain concernés. La loi va doter la Belgique d’un ensemble de dispositifs de prévention, d’analyse, de suivi des féminicides et des homicides fondés sur le genre et de protection des victimes. Il s’agit de la concrétisation d’engagements pris dans le Plan d’action national de lutte contre les violences basées sur le genre (PAN) 2021-2025. Cet engagement trouve sa source dans la mobilisation de longue date des organisations féministes.
La loi adopte de nombreuses définitions, tant du féminicide lui-même que des violences qui le précèdent comme la violence sexuelle, la violence psychologique ou le contrôle coercitif.
La loi définit quatre catégories différentes : le féminicide intime (par exemple, par le partenaire), le féminicide non intime (par exemple, une travailleuse du sexe tuée par un client), le féminicide indirect (par exemple, la mort après un avortement forcé ou après une mutilation génitale féminine) et l’homicide fondé sur le genre (par exemple, un homme transgenre qui meurt dans le contexte de la violence du partenaire). Ces définitions sont donc importantes pour toute initiative future visant à mettre en œuvre la loi sur le féminicide.
La loi prévoit la collecte des données et 2 publications :
Un rapport annuel reprenant les principales statistiques liées aux féminicides, les caractéristiques des victimes, des auteurs et de la relation entre la victime et l’auteur.
Tous les deux ans, un rapport qualitatif sur les féminicides et les homicides fondés sur le genre qui met en évidence leur fréquence, les taux de condamnation, l'efficacité des mesures prises pour mettre en œuvre la Convention d’Istanbul.
L’objectif est d’avoir une vision de l’ampleur du problème et de ses caractéristiques afin d’en tirer les enseignements nécessaires pour renforcer la prévention contre les féminicides. L’Institut pour l'égalité des hommes et des femmes sera chargé de cette tâche de rapportage et publiera ces publications sur son site web afin qu'elles soient accessibles à toutes et tous.
La loi crée un Comité Scientifique d’analyse des féminicides et des homicides fondés sur le genre, qui analysera les féminicides et les homicides fondés sur le genre sur la base de cas individuels.
Les victimes de violence de genre sont également au centre des préoccupations du texte. Les victimes disposeront d’une série de garanties concernant les conditions de leur audition par la police (langue, choix du sexe de la personne qui les interroge, discrétion, informations sur les mesures de protection etc.). L’utilisation d’un outil d’évaluation des risques sera également rendue obligatoire, à actualiser à chaque nouvelle étape de l’enquête. Cela devrait permettre à la police et à la justice de mieux évaluer les risques encourus par une victime, d’analyser la dangerosité des auteurs et de prendre des mesures de protection telles qu’une mesure d’éloignement ou une alarme antirapprochement.
Enfin, la loi prévoit que les formations existantes pour les policiers et les magistrats accordent une attention particulière aux féminicides et au cycle de violence qui les précède.
Depuis le début de l’année 2023, le blog Stop Féminicide a recensé sur la base d’articles de presse, 17 féminicides en Belgique. Pour la Secrétaire d’Etat à l’Egalité des genres, Marie-Colline Leroy :
« Chaque drame nous rappelle l’urgence d’agir. Le féminicide est la forme la plus extrême de violence de genre. Ce nouveau cadre légal renforce la capacité de détecter les risques, d’apporter un meilleur suivi et une meilleure réponse aux féminicides et homicides de genre ainsi qu’une meilleure protection aux victimes de violence. L’aboutissement du projet de loi témoigne de la détermination affichée dès le début de la législature par le gouvernement de faire de la lutte contre les violences basées sur le genre une priorité, relayant ainsi la mobilisation forte de la société civile et plaçant la Belgique au rang de pionnière dans l’approche légale des féminicides. ».
Vincent Van Quickenborne, ministre de la Justice : "Dans notre pays, on estime qu'une femme sur cinq subira un jour ou l'autre des violences de la part de son (ex-)partenaire. Ces chiffres sont effrayants. Ce type de violence reste souvent caché derrière des façades, ce qui le rend moins visible. C'est précisément la raison pour laquelle il s'agit d'une priorité pour le gouvernement. Ainsi, le droit pénal sexuel a déjà été réformé, avec le consentement comme concept central et, entre autres, des peines plus sévères pour les viols, y compris intrafamiliaux. Nous avons introduit l'alerte mobile de harcèlement afin que la police puisse intervenir plus rapidement dans les cas de harcèlement d'ex-partenaires qui mettent leur vie en danger. Les procureurs imposent de plus en plus souvent des ordonnances restrictives temporaires afin que les partenaires violents puissent se voir refuser l'accès au domicile immédiatement après l'infraction. Le nouveau code pénal s'attaque aussi beaucoup plus sévèrement à la violence intrafamiliale. Toutefois, la justice ne peut agir qu'après coup. C'est pourquoi ce projet de loi contribue à mieux identifier, prévenir et combattre la violence fondée sur le genre".
Annelies Verlinden, ministre de l’Intérieur : « Afin de lutter contre la problématique des violences sexuelles et domestiques, il est impératif que nous collaborions avec l'ensemble des autorités pour combattre le phénomène le plus efficacement possible. L'année dernière, j'ai donc investi 1,5 million d'euros dans 15 projets locaux innovants de prévention de la violence domestique. Ces projets sont actuellement concrétisés et feront l'objet d'une évaluation approfondie cette année et l'année prochaine. Avec l'introduction d'une alarme mobile anti-harcèlement, nous voulons offrir aux victimes un sentiment de sécurité et de sérénité. D'une simple pression sur un bouton, elles peuvent appeler la police sur place et bénéficier d’une intervention rapide. Nous devons poursuivre nos efforts, protéger les victimes au maximum et envoyer le message clair que la société ne tolère pas cette violence. »