Sandrine Hermans est une jeune carolo active, une bonne vivante comme on dit chez nous. Agée d'une quarantaine d'années, lorsque la crise du coronavirus est arrivée chez nous, elle ne s'est jamais imaginée être touchée par la maladie. Pourtant quelques jours à peine après le confinement, elle a ressenti d'étranges symptômes vite confirmés. Aujourd'hui, elle garde des séquelles importantes du virus et met en garde.
On n'a pas toujours envie de se montrer dans des moments de fatigue ou de faiblesse, Sandrine a accepté de témoigner pour aider ceux qui sortent petit à petit de cette maladie retord qu'est le Coronavirus, mais elle a préféré ne montrer d'elle que cette photo publiée sur sa page Facebook.
Cette jeune femme d'ordinaire si active, sociable et dynamique est restée confinée chez elle comme tout le monde dès le 13 mars. Tout va alors très bien, elle commence à faire du télétravail, mais après seulement une semaine, elle développe les symptômes d'une grosse grippe. Elle a la gorge fortement irritée, de la fièvre, mal partout et des migraines atroces « à se taper la tête aux murs ». Son médecin lui conseille donc de rester chez elle avec du paracétamol pour les migraines. Elle arrête de travailler, elle est K.O. et puis elle se rend compte qu’elle perd le sens du goût.
Au moment où Sandrine croit que ça va mieux, les choses empirent, elle a du mal à respirer et son rythme cardiaque s’affole. Le 11 avril, elle se retrouve donc dans un service d’urgence saturé « du jamais vu, il y avait des gens partout !» à l’hôpital Notre Dame de Grâce de Gosselies. Cette fois le diagnostic est clair, elle est atteinte de la Covid-19 et comme dans beaucoup de cas après 15 à 17 jours de symptômes, le virus est tombé dans ses poumons. Sandrine a une pneumonie collée sur la plèvre. D’où ses sensations d’étouffement et d’oppression.
Prise en charge à temps, elle est malgré tout renvoyée chez elle avec un antibiotique à spectre large et un remède pour gérer la pneumonie.
« J’étais dans un état semi-conscient, j’allais de mon fauteuil à mon divan. J’étais excessivement fatiguée, je n’avais pas le moral, plus de goût, ni d’odorat. Tu as peur et tu ne demandes qu’une chose c’est qu’il s’en aille, même si tu ne sais rien faire d’autre qu’attendre. Et ça fait mal en plus. »
Un long chemin vers la guérison
Un mois plus tard, lorsque les symptômes les plus sévères s'atténuent, Sandrine remarque des anomalies, elle commence à se rendre compte que sa guérison va prendre du temps.
« J'ai commencé à aller mieux vers la mi-mai, le goût et l’odorat ont commencé à revenir doucement, mais je n’ai pas récupéré ces facultés à 100%. Je perds ma voix, sans savoir pourquoi. J’ai des gros problèmes de concentration et de mémoire. Il faut parfois que je réfléchisse à ce que j’ai fait la veille. J’ai trois séances de kiné par semaine, parce que mes muscles étaient complètement atrophiés. Il y a trois semaines par exemple je ne savais pas lever le bras au-dessus de la tête. »
Sandrine a aujourd’hui peur de ressortir et de voir du monde. Elle n’est pas phobique, mais elle n’a aucune envie de retomber sur ce virus.
« Les médecins ont été formidables, sans eux je n’aurais peut-être pas tenu le coup. Ils ont fait un travail incroyable, un soutien… c’était exceptionnel. Honnêtement, si on ne m’avait pas envoyé aux urgences pour détecter ça, je ne serais peut-être plus là. ça tient à peu de choses, il est vraiment dangereux. »
Sa médecin l'avait prévenue, il lui faudra des semaines pour s'en remettre, malgré cela Sandrine trouve le temps long et s'étonne du manque d'information vers le grand public sur cette réadaptation compliquée. Elle se dit que cela pourrait faire réfléchir.
« On est mi-juin et j’ai vraiment du mal. Il y a un mieux tous les jours, mais c’est lent, pénible, douloureux. Il me faut parfois un certain temps pour me lever le matin, je ne sais pas faire grand chose dans la maison parce que j’ai vite mal. C'est comme si j'avais de la Fibromyalgie. Il y a des jours, tu te demandes si tu vas tout récupérer, même le goût, l’odorat, c’est des bêtises mais quand tu les perds c’est difficile à vivre. Et les pertes de concentration et de mémoire, c’est effrayant. Quand je vais chez mon kiné, une fois sur deux je me trompe de chemin. Mais je ne suis pas seule, un collègue de mon compagnon a les mêmes problèmes de concentration que moi. Cela me rassure, mais d’un autre côté on se sent diminué »
Des médecins désemparés face à l’après covid
Les symptômes Post-Covid, peuvent être problématiques et protéiformes. La revue médicale Medscape relate qu' en France, dans les régions de l’Est particulièrement touchées, les services d'infectiologie et de médecine interne reçoivent de plus en plus de patients qui ne se sentent toujours pas mieux deux mois après la maladie. Le syndrome post-Covid semble toucher particulièrement les femmes d’une quarantaine d’années, sans facteur de risque particulier.
« Les médecins sont désemparés, nous raconte encore Sandrine, parce qu’ils n’ont pas assez de recul. Je viens de voir qu’en France, ils ont ouvert une aile spéciale dans l’hôpital pour les patients qui souffrent de séquelles violentes. Il y a des médecins, des kinés, des psychologues. Eux se rendent compte qu’il y a des séquelles importantes, et je n’ose imaginer ceux qui ont été dans le coma, il leur faudra des mois, des années pour en sortir. »
Selon le docteur Benjamin Davido de l’Hôpital de Garches, en Ile-de France, dans la revue Medscape :
« il faut prendre en charge ces patients avec rigueur. Il ne faut écarter aucune piste sous prétexte qu'il s'agirait « seulement » d'un post-Covid. Je crois que la prise en charge pluridisciplinaire est importante et selon les symptômes, le patient peut être orienté également vers un rhumatologue, un cardiologue, un dermatologue. Un soutien psychologique me semble nécessaire. »
« Un déconfinement trop laxiste »
Sandrine est convaincue que si elle n’avait pas été touchée par le Coronavirus, elle ne réagirait pas comme aujourd’hui. Mais pour l’avoir vécu, elle veut nous mettre en garde, cette maladie n’est pas un rhume ou une simple grippe, elle peut être extrêmement violente et handicapante.
« Les gens qui ne l’ont pas eu, ou qui n’ont pas un proche qui l’a eu, ils ne se rendent pas compte. Et j’ai beaucoup de personnes qui m’ont dit la même chose "on ne savait pas que c’était à ce point là"… Et je comprends. Si je ne l’avais pas eu, je dirais peut-être aussi qu’ils exagèrent, mais là je peux dire qu’ils n’exagèrent pas du tout. Et je trouve que le déconfinement, est un peu trop laxiste. Il ne faut pas vivre dans la paranoïa, mais il faut faire attention. »
Il faut aussi prendre en compte tous ces malades qui mettront des semaines, voire des mois à s’en remettre !