Après pas moins de onze heures de débat, la commission Climat du Parlement wallon a approuvé mardi au milieu de la nuit un projet de décret censé placer la Région sur la voie de la neutralité carbone à l'horizon de 2050.
Porté par le ministre Ecolo Philippe Henry, le nouveau texte, qui actualise le précédent décret wallon "Climat" de 2014, intègre notamment les nouveaux objectifs de réduction des gaz à effet de serre fixés par l'Union européenne pour 2030 et 2050.
La Région wallonne s'est engagée à réduire ses émissions de 55% d'ici 2030, et atteindre la neutralité carbone vingt ans plus tard. Outre cette confirmation, le nouveau décret renforce le comité d'experts sur le climat qui conseille la Région. Celui-ci passera de 7 à 10 membres.
Il ouvre également la voie à un dispositif de participation citoyenne sur le sujet, offre une base légale pour le soutien financier aux communes face au défi climatique, et prévoit une série de mesures d'adaptation face au réchauffement en cours.
Ainsi, une stratégie d'adaptation avec des objectifs sur cinq ans sera définie afin d'identifier les publics et zones vulnérables. Il est aussi prévu de renforcer les capacités de prévision et d'action en cas de phénomènes climatiques extrêmes (inondations, sécheresse,...).
Autre nouveauté: le texte amorce le lancement de la 3e génération des accords de branches en vigueur pour les industries.
Rebaptisés dorénavant 'conventions carbone', ces accords de branches -qui ont permis de réduire les émissions du secteur de 18% depuis 2005 selon le ministre Henry- seront élargis sur une base volontaire aux petites et moyennes entreprises, ainsi qu'au secteur public.
A l'été dernier, le comité wallon d'experts sur le climat avait déploré le contenu du projet de décret, fruit d'un compromis au sein de la majorité wallonne. Selon ce comité, le décret ne permettrait pas à la Wallonie d'atteindre son objectif de neutralité carbone à l'horizon 2050.
Lundi après-midi, à l'entame des débats sur le texte en commission, l'opposition PTB ainsi que les Engagés ont demandé avec insistance à ce que ces experts puissent être auditionnés, mais les députés de la majorité PS-MR-Ecolo ont repoussé la requête.
Le décret a finalement été approuvé mardi aux petites heures majorité contre opposition.
Chez les Engagés, Jean-Luc Crucke a voté contre. L'ancien ministre wallon a dénoncé un "rendez-vous raté" et une "marche arrière du gouvernement" par rapport aux engagements climatiques pris dans l'accord de majorité.
"Face à l'urgence climatique, je ne comprends pas qu'on vienne avec un texte comme celui-là et qu'on continue à nous dire qu'il est merveilleux", a grincé le député, pointant notamment la disparition d'objectifs sectoriels.
Pour sa défense, le ministre Henry a indiqué qu'il était logique que le nouveau décret ne contienne pas de mesures concrètes de réduction, celles-ci ayant été intégrées dans le nouveau Plan Air Climat Energie (PACE) adopté récemment par l'exécutif wallon, a-t-il expliqué.
Du côté du PTB, le député Laszlo Schonbrodt s'est abstenu, en pointant un décret "pas à la hauteur de l'urgence climatique".
"En fait, vous continuez les vieilles recettes de la politique climatique. Mais est-ce ça l'apport d'un ministre écologiste au gouvernement wallon?", a-t-il attaqué.
L'élu marxiste a notamment critiqué le mécanisme des accords de branche qui, selon lui, a permis aux entreprises participantes de profiter d'un soutien financier public sans réellement réduire leurs émissions.
Outre ce décret neutralité carbone, les députés ont approuvé lundi la clé de répartition convenue entre les entités du pays pour le partage des montants versés dans le fonds Kyoto, mais pour les seules années 2021 et 2022. Pour les années suivantes, les discussions sont toujours en cours.
Les deux textes devraient définitivement être approuvés le mois prochain en séance plénière du Parlement de Wallonie.
Source: Belga