La Fédération Wallonie-Bruxelles va imposer l'écriture inclusive à l'écrit comme à l’oral dès le 1er janvier prochain. Si pour certains, il s’agit d’une aberration, pour la ministre de la Culture, des Médias et des Droits des femmes, Bénédicte Linard, il s’agit de visibiliser les femmes.
A partir du 1er janvier 2022, n’écrivez plus "travailleurs" mais bien "travailleurs et travailleuses". C’est en tout cas ce genre d’écriture plus inclusive qui sera préconisée en Fédération Wallonie-Bruxelles. Les communes, les provinces, toutes les institutions reconnues/subventionnées par la Communauté (médias, établissements d'enseignement, etc.) ainsi que les parlements et gouvernements sont concernées. Un projet de décret a été approuvé hier à l’unanimité.
On entend déjà les critiques fuser. Mais pas question de rendre ce type d’écriture pénible ou illisible pour le lecteur. L’objectif est de gommer dans le langage ce qui pourrait s'apparenter à de la discrimination sexiste et genrée.
L'écriture inclusive = points médians ?
L'écriture inclusive ne se résume pas aux points médians (é.e.s). Il existe de nombreuses façons d’être plus inclusif. Le décret prévoit des formes alternatives qui permettent plus de visibilité pour les femmes : l’écriture épicène (exemple : adulte, camarade,…), la forme double quand on parle d’un groupe de personnes (exemple : candidates et candidats), la rédaction non-sexiste (comme en Suisse), la forme passive pour neutraliser l'opposition de genre, le langage neutre, non sexiste ou dégenré.
Avec cet argument, on balaie déjà l’idée reçue qu’il faudra tout féminiser. On ne va pas commencer à féminiser le mot tabouret par exemple ou à masculiniser le mot chaise.
Pour celles et ceux qui pensent que le défi à l’oral est davantage compliqué, iels se trompent puisque la formule double pour parler d’un groupe est une des réponses possibles à ce problème. Par exemple, au JT, on pourra entendre que les travailleurs et travailleuses ont fait grève.
La langue française, une langue en pleine (r)évolution
Il y a aussi la féminisation des métiers. Et oui, le mot autrice est bel et bien reconnu par l’académie française. Au lieu de parler des droits de l’Homme avec une majuscule, on parlera des droits humains.
Mais que les gens choqués par ce décret se rassurent, il n’est pas question de supprimer le masculin mixte. Il faudra faire preuve de discernement pour reconnaître qu’on a tendance à trop souvent utiliser une représentation mentale qui n’est pas toujours mixte et équitable. Pas facile tous les jours pour certain.e.s.
Est-ce que cette écriture plus inclusive détruit la langue française ? Et bien non, c’est en tout cas le point de vue d’Eliane Viennot, professeure émérite de littérature de la Renaissance. "Jusqu’au 17ème siècle, les noms des métiers et des dignités exercées par des femmes étaient au féminin" explique-t-elle à nos confrères du quotidien Le Monde. La langue française est en perpétuelle évolution et il faut l’accepter.
Loin d’être une dictature féminazie comme le disent certain.e.s, cette écriture est une manière de lutter contre les stéréotypes notamment sexistes véhiculés par la langue française. Pourquoi le masculin l’emporterait-il sur tout ? Ce décret veut avant tout gommer l’invisibilité des femmes dans la langue française.
A titre d’exemple, le japonais et le turc font partie des langues sans genre. En anglais, le genre féminin et masculin ne concernent que le pronom personnel sujet (she/he), complément (her/him), possessif (herself/himself), l’adjectif possessif de la troisième personne (his/her). A noter qu’aucune sanction n'est prévue pour le non-respect de ces consignes.