Des perquisitions ont été menées au sein de l'intercommunale carolo de santé publique Humani hier par une juge d'instruction et le parquet de Charleroi, avec des enquêteurs pour la répression de la corruption. L’enquête porte sur l’achat d’un terrain.
3 personnes ont été entendues par la police jeudi, 2 différées devant la juge d’instruction, à savoir Karalabos Raptis, l'actuel président du conseil d'administration d'Humani, et le vendeur. En cause : un transfert suspect de 100.000 euros provenant du vendeur du terrain sur un compte du président, à l’époque administrateur. Un potentiel pot-de-vin ?
On a été complètement surpris par la visite des enquêteurs, indique Frédéric Dubois, le directeur de la communication d’HUmani. L’Intercommunale a été interrogée en tant que témoin, et même victime potentielle à condition qu'on y trouve un préjudice.
Connaissant l’homme, ça m’étonnerait grandement, explique Daniel Vanderlick (PS), ancien président du conseil d’administration d’HUmani et ancien bourgmestre de Châtelet. C’est un charmant médecin, quelqu’un d’honnête. Cet achat a été approuvé devant le conseil d’administration et le notaire. Tout était normal et il n’y avait aucune raison que cet achat soit suspect.
Mais l’achat s’est-il réellement fait dans les règles de l’art ?
Un achat qui pose question ?
Selon certains administrateurs, cet achat pose en effet question dès le début de l’affaire pour plusieurs raisons. Tout d’abord, le projet d’y transférer le futur hôpital Van Gogh, ce qui justifiait cet achat, tombe à l’eau.
Il s'est avéré qu’au terrain de Châtelineau, la déclivité était trop importante. Et les médecins, une fois qu'on les a consultés, nous ont dit que pour un patient en psychiatrie, ça pouvait être un peu stressant, détaille Frédéric Dubois.
Un nouvel élément qui préoccupe rapidement Nicolas Tzanetatos (MR), un administrateur d’HUmani : « n’a-t-on pas fait une étude préalable à l'acquisition d'un tel terrain pour un prix quand même conséquent de 1,6 million d’euros ? »
Le terrain accueillera finalement un autre projet, notamment une nouvelle maison de repos. S’il n’a donc pas été acquis inutilement, certains administrateurs regrettent tout de même qu’il n’y ait pas eu de réelle évaluation avant l’achat.
La seule évaluation communiquée, c'est le notaire qui aurait dit qu’on a fait un bon achat, explique Nicolas Tzanetatos.
On aurait également montré à l’administrateur que l'agence immobilière du vendeur indiquait que le terrain valait entre 3 millions et 5 millions d'euros et que donc « c’était presque une donation que l'on faisait à l'intercommunale en lui vendant 1,6 million ».
Une vente trop parfaite ?
Et c’est le deuxième fait étonnant: le vendeur avait acheté ce terrain pour 26 000€ et pouvait apparemment en obtenir bien plus que 1 million. Pourquoi le vendre alors à Humani, ex-ISPPC ?
Le docteur Raptis, qui était administrateur, avait une connaissance qui vendait un terrain stratégiquement placé au bord de la nationale, en face de l'actuel hôpital des Viviers, et donc à un endroit bien placé pour l'hôpital, détaille le directeur de la communication.
Le vendeur avait l’opportunité de vendre le terrain plus de 3 millions d’euros. Mais il a préféré le vendre à Humani, afin de laisser quelque chose derrière lui, se dire qu’il aura mis sa pierre à l’édifice, ce qui est louable de sa part, ajoute Daniel Vanderlick.
Mais aujourd’hui, rien n’est confirmé. Ce qui préoccupe surtout les administrateurs à l’heure actuelle c’est la suite pour Humani et surtout la transparence. Nicolas Glogowski (Ecolo), administrateur au sein d’Humani, a donc demandé ce matin la convocation d’un conseil d’administration extraordinaire afin de tirer les choses au clair dans ce dossier.
Dans l’après-midi, la juge d’instruction a estimé qu’il n’y avait pas suffisamment d’indices à ce stade. Les 2 personnes déférées ont été relaxées sans être inculpées. Mais l’instruction suit son cours, affaire à suivre.