L'interdiction de vente d'alcool et de produits de tabac aux mineurs reste un défi majeur, révèlent jeudi les résultats d'une campagne de contrôle menée à l'initiative du SPF Santé publique.
En effet, de nombreux commerces ne respectent toujours pas la législation. Ainsi, près de 90% d'entre eux continuent de vendre des boissons alcoolisées à des mineurs!
Organisée à l'été 2023, cette campagne "Mystery shopping" (clients mystères) a été annoncée à l'avance au secteur concerné.
Selon le modus operandi établi, des jeunes de 15, 16 et 17 ans devaient tenter d'acheter de l'alcool et des produits du tabac, accompagnés d'un inspecteur expérimenté du SPF Santé publique. Tout cela incognito. Il leur était strictement interdit de mentir sur leur âge. Ils devaient également porter des vêtements d'ados et ils n'avaient pas le droit de consommer les produits achetés.
Résultat? L'enquête de terrain montre que 69,4% des 1.104 magasins de produits du tabac contrôlés étaient en infraction, tandis que 89,5% des 764 magasins contrôlés vendaient des boissons alcoolisées à des acheteurs mineurs.
Il apparait également que les jeunes de 15 ans sont tout aussi susceptibles d'acheter des produits du tabac et des boissons alcoolisées que les jeunes de 16 et 17 ans.
Par ailleurs, lors de l'achat d'alcool, l'âge n'a été demandé que dans 13,2% des cas et la preuve d'identité des jeunes acheteurs que dans 4,9%. Dans les cas de vente de produits du tabac, ces proportions étaient respectivement de 29,8% et 12,8%. "Les contrôles sur la vente d'alcool aux mineurs semblent donc moins stricts que ceux sur la vente de produits du tabac au même groupe d'âge", selon le SPF.
Parmi les différents types d'établissements, le secteur de l'hôtellerie et de la restauration est le moins performant, avec un taux d'infraction atteignant 96,5%.
"Nous constatons lors des contrôles que des jeunes de 15 ans n'ont aucun problème à se procurer des spiritueux. Même pour les produits du tabac, dont tout le monde est convaincu qu'ils sont nocifs pour les jeunes, les chiffres sont mauvais", déplore Paul Van Den Meerssche, chef du service Inspection du SPF Santé publique. "Actuellement, nos jeunes ne sont pas suffisamment protégés contre les dangers de l'alcool et du tabac (...) L'industrie doit prendre ses responsabilités et procéder sérieusement aux contrôles d'âge. Par ailleurs, il sera obligatoire de demander une preuve d'âge à tout client potentiel qui semble avoir moins de 25 ans dès 2025", prévient-il.
Il est à noter que les commerçants qui ont déjà commis une infraction n'appliquent presque jamais la vérification de l'âge lorsqu'ils sont contrôlés à nouveau. Le pourcentage de récidivistes est donc très élevé, pointe encore le rapport.
Pour rappel, la vente de bière et de vin est interdite aux moins de 16 ans, tandis que la vente des autres boissons alcoolisées n'est pas autorisée aux moins de 18 ans. Les produits du tabac (y compris les e-cigarettes) eux ne peuvent être vendus aux moins de 18 ans.
Tous les établissements contrôlés ont reçu une lettre avec les résultats des contrôles. Aucune amende n'a été dressée pour l'instant, l'objectif de cette campagne étant d'identifier et de sensibiliser au problème. Une nouvelle action est prévue par le SPF Santé publique cet été, toujours à l'aide de clients mystères.
Dans une réaction, Frank Vandenbroucke (Vooruit) a qualifié ces chiffres d' "absolument inacceptables". Le ministre de la Santé se dit particulièrement choqué par les taux de récidive. "À l'avenir, nous imposerons des sanctions, le cas échéant. Nous prévoyons notamment des amendes et d'éventuelles fermetures (des établissements, NDLR.) allant d'une heure à 30 jours, en cas de non-respect délibéré et répété de la législation".