Lundi soir, le conseil communal de Charleroi a approuvé une motion, déposée symboliquement par le PS, visant à déclarer Charleroi « ville antifasciste ». La motion a été votée à la majorité, moins 2 abstentions.
C’est en présence des syndicats FGTB-CSC qu’une motion visant à déclarer Charleroi en tant que « ville antifasciste » a été approuvée lundi. Cette motion a été élaborée par une coalition qui a vu le jour avec cette motion : le CAC, Coalition Antifasciste de Charleroi. Elle est composée de représentants du front commun syndical FGTB-CSC, du monde associatif, du monde politique progressiste et de la société civile.
« Le fascisme nuit à la santé de tous les citoyens. Cette motion n’est que le premier pas de cette coalition. Le but c’est de devenir des lanceurs d’alerte, des informateurs et des formateurs sur le fascisme », se réjouit Latifa Gahouchi, conseillère PS.
Cette motion fait suite notamment aux événements du 25 janvier 2020 à Gilly, où une manifestation antifasciste avait mal tourné. Souvenez-vous, les manifestants exprimaient leur mécontentement devant les locaux de la PNE (parti national européen), un parti jugé par certains comme faisant partie de l’extrême droite. Les forces de l’ordre avaient eu recours à des gaz lacrymogènes et à l’autopompe, ce qui avait interpellé de nombreux citoyens.
Des actions concrètes pour mener à bien cette lutte
Cette motion a été déposée symboliquement par le groupe PS, mais le PTB, Ecolo et C+ figuraient également parmi les participants au groupe de travail qui ont élaboré le texte pendant des mois.
« Nous ne voulons pas de l’extrême droite dans notre pays. Il n’y a pas de place pour la haine, le racisme, l’antisémitisme, le sexisme, la discrimination relative à l’orientation sexuelle, etc. », déclare Thomas Lemaire, conseiller PTB.
Concrètement, la motion vise entre autres à :
- Empêcher la diffusion de propos incitant à toute forme de haine, racisme, etc.
- Inviter les services compétents à prendre en considération tous les signaux d’incitation à la haine, au racisme, etc.
- Inviter le bourgmestre et les services compétents à prendre un arrêté motivé en autorisant ou interdisant l’événement.
- Sensibiliser et impliquer la jeunesse carolo aux dangers liés à l’extrême droite
- Faire de nouveau du 8 mai un jour férié
Lire la motion dans son entièreté.
« La CAC a pour objectif de réagir rapidement en cas d’événements d’extrême droite à Charleroi. Aucune discussion n’est possible avec ses partis. La haine de l’autre, le fascisme, ne passera pas ! Nous l’empêcherons de passer dès que cette peste brune pointera le bout de son nez », annonce Latifa Gahouchi, conseillère PS.
Un nouveau jour férié
En approuvant cette motion, le conseil communal approuve la revendication d’un nouveau jour férié. L’article 4 de cette motion stipule : dans le cadre du devoir de mémoire de la résistance face à l’Allemagne nazie, au fascisme et à l’extrême droite, nous revendiquons que le 8 mai soit de nouveau un jour férié.
Un point que n’approuvait pas le MR :
« Nous soutenons cette motion. Mais nous déposons un amendement quant à l’article 4. C’est un combat de tous les jours qui ne nécessite pas à mon sens un jour férié. Il y a d’autres causes pour lesquelles on doit se battre, un jour férié pour cette lutte en particulier signifierait hiérarchiser nos luttes. Je pense que les luttes contre le cancer du sein ou pour le droit des femmes par exemple sont aussi importantes, et n’ont pas pour autant de jours fériés qui leur sont destinés », indiquait Nicolas Tzanetatos, conseiller et chef de groupe MR.
L’amendement déposé par le groupe afin de supprimer cet article a finalement été rejeté.
Une motion qui bouge ou qui stagne ?
La motion a été approuvée à l’unanimité sauf abstention de Jean-Noël Gillard, conseiller et chef de groupe Défi, et de Nicolas Kramvoussanos, conseiller indépendant. Le chef de groupe Défi craignait que cette motion n’apporte pas beaucoup de nouveautés par rapport à ce qui est déjà mis en place.
« Nous sommes d’accord avec la philosophie du texte et avec la mise en place de cette coalition. Nous sommes pour la lutte contre l’extrémisme. Mais la motion renvoie la responsabilité au bourgmestre, qui doit lui-même autoriser ou non un événement. Cette motion propose donc des dispositifs déjà mis en place. Je pense qu’on lutte déjà contre le fascisme et que le bourgmestre est déjà en mesure d’interdire ou non un événement. Cette lutte va nécessiter de fédérer bien davantage que la motion ne le propose. »
Paul Magnette, bourgmestre de Charleroi ravit de cette motion, n’était pas du même avis.
« Je me réjouis de cette motion. Contrairement à ce que vous pensez, on va plus loin que ce qui n’existe déjà. Rappelez-vous que l’essence même du fascisme, c’est de ne pas respecter les droits en faisant semblant de les respecter. Avec cette motion, les services compétents prendront un arrêté motivé en autorisant ou interdisant l’événement. Il n’y a donc plus de situation de tolérance (ni interdit ni autorisé), cette zone grise et ambiguë disparaît. Cette fois, on prendra toujours une décision, et on fera toujours tout pour l’interdire en respectant les droits et les procédures, pour le bien de la démocratie. »
Latifa Gahouchi, conseillère PS, a conclu le débat :
« Je ne comprends pas comment ne peut pas voter pour une telle motion. Le courage, c’est de voter pour ! On ne veut plus jamais de fascistes, au sein de ce conseil communal. »
Des paroles suivies par de nombreux applaudissements.
Apolline Putman