Charleroi a cette image qui lui colle à la peau depuis des années où il existe un certain sentiment d’insécurité. Si la délinquance est bien présente comme dans toutes les grandes villes, ce sentiment est subjectif qu’il faut absolument éviter de globaliser. Depuis déjà 10 ans, la ville se transforme et on tente d’endiguer ce sentiment d’insécurité, mais énormément de paramètres doivent entrer en ligne de compte.
Se balader seul le soir dans une rue déserte peut faire naître un sentiment d’insécurité. Et ce sentiment n’existe quasi plus lorsque l’on passe dans cette même rue à un autre moment de la journée. « Vous avez aussi des gens qui confondent la peur et le risque, nuance le criminologue de l’UCLouvain, Vincent Francis. Les populations masculines relativement jeunes sont conscientes du risque, mais n’ont pas peur même s’elles sont à un tel endroit à un tel moment. Par contre, vous avez des personnes plus âgées qui pensent que la probabilité d’être agressé est plus faible, et si ça arrive, ce sera terrible pour ces personnes. »
Souvenez-vous de la place Albert 1er qui est aujourd’hui l’actuelle place Verte. Cette place était un parking et était entourée par les colonnades. « Avant, c’était un espace assez difficile, un espace dans lequel on ne sentait pas très bien, car l’occupant principal était la voiture, rappelle le Georgios Maillis, le bouwmeester de Charleroi. Et là où on avait un sentiment d’insécurité il y a encore quelques années, cet espace est devenu agréable dans lequel on retrouve des familles. Le sentiment d’insécurité s’est transformé en sentiment de bien-être, chose qu’on n’avait pas du tout avant. »
Le sentiment d’insécurité représente une anticipation du risque, que l’on croit courir qui se superpose à la représentation des violences dont on pourrait être victime. « Ce sont les personnes âgées et les femmes qui ont ce sentiment. Ce sont les catégories de personnes qui se sentent davantage en insécurité. Alors que dans les statistiques, ce sont les personnes âgées qui sont le moins agressées parce qu’elles restent à la maison. Donc les personnes les plus agressées sont celles qui sortent, qui sont plus mobiles. », explique le criminologue.
Les incivilités sont plus impactantes que la délinquance
Les désordres et les incivilités ont plus d’impact sur le sentiment d’insécurité que les actes de délinquance. Et, un environnement mal entretenu est perçu comme hostile qui témoigne d’une forme d’abandon. C’était le cas du parc Reine Astrid. « Il y avait des activités illicites qui se déroulaient dans ce parc. C’était un espace fermé avec beaucoup d’arbustes utilisées comme des caches par les dealers », se souvient Georgios Maillis.
Un coup de baguette magique
Mais au lieu de fermer complètement le parc, une autre solution a été trouvée.
« Est-ce qu’au contraire, on n'ouvrirait pas le parc ?, s’étaient interrogées les autorités de l’époque. On a retiré tous ces arbustes pour avoir un espace ouvert, repensé le parc au niveau de sa circulation et au niveau des activités avec une aire de jeux. Du jour au lendemain, les activités illicites qui avaient lieu dans ce parc ont stoppé. »
Si la sécurité se traduit au travers de chiffres, qui ne font que baisser au fil des années, le sentiment de sécurité est subjectif, il varie selon le contexte, le cadre spatio-temporel et plein d’autres paramètres. L’insécurité et le sentiment d’insécurité sont deux choses différentes, leurs diagnostics ne peuvent se faire qu’avec la conscience de cette différence.
O.Boh