Vingt ans qu'on en parle. Cette fois il semble que la Ville de Charleroi soit bien décidée à démolir la maison de Marc Dutroux à Marcinelle. Pour en faire un jardin du souvenir, comme elle l'a fait à Jumet lorsqu'elle détruisit le châlet de Bernard Weinstein, l'autre maison de l'horreur.
Vingt aussi que ce projet de démolition fait débat. La question : faut-il démolir le bâtiment afin d'éradiquer les derniers reliquats des atrocités commises par le psychopathe ? Ou, au contraire, faut-il le conserver tel un sanctuaire afin que, justement, on n'oublie jamais le calvaire enduré il y a 25 ans par Julie et Mélissa.
Difficile de trancher. Simplement parce que, dans un sens comme dans l'autre, les implications humaines sont multiples. A commencer par celle des parents des deux petites filles qui, si la maison est détruite, verront partir en poussières les derniers souvenirs de leurs enfants, comme les inscriptions au mur de la cave laissées par Julie.
Il y a les riverains aussi. Dont certains n'en peuvent plus de voir défiler depuis plus de deux décennies un tourisme morbide et des caméras de télévisions à chaque anniversaire. Et d'autres qui redoutent, au contraire, que la création d'un jardin du souvenir amplifie justement le phénomène des visites à répétition.
Et puis il y a nous, simples citoyens (et en particulier carolos), tiraillés entre la volonté de laisser définitivement derrière nous l'un des faits divers les plus tragiques et les plus horribles du 20e siècle qui a littéralement plombé une région et un pays, et celle de maintenir vivace ce symbole de l'échec de tout un pan de la société (la police, la Justice, les services sociaux notamment) comme exemple à ne plus jamais suivre à l'avenir.
Reste donc à espérer effectivement que la disparition de cet endroit maudit apaise quelque peu certaines plaies qui malgré tout ne se refermeront jamais. Ni à Charleroi, ni ailleurs en Belgique.