La mission de Sophie Wilmès, mais aussi de tous les experts du GEES, n'est pas simple. D'abord bien sûr parce qu'en matière de déconfinement, les décisions progressives qui sont à prendre les placent sur le fil du rasoir en permanence, obligés qu'ils sont de trouver le juste équilibre entre un lent retour à une vie normale et la préservation de la santé publique.
Mais il est un autre pan du travail de la Première Ministre et de son équipe : c'est expliquer et justifier les décisions qui sont prises. Un travail pédagogique essentiel, non seulement pour que chacun s'approprie les mesures, les intègre et les applique pour le bien-être collectif, mais également pour éviter les frustrations dans les bulles et sous-bulles que le déconfinement par phase risque de créer.
Et là, reconnaissons-le, le bât blesse méchamment. La communication n'est jamais assez claire et les incompréhensions sont plus nombreuses à chaque annonce d'une phase de déconfinement.
Bien sûr, on imagine que derrière chaque mesure évoquée par la Première, se cache une raison scientifique savamment étayée. Mais alors qu'elle le dise.
Parce que dans un petit théâtre, on ne comprend pas pourquoi on ne peut toujours pas accueillir un peu de public alors que les compagnies aériennes annoncent la reprise de leurs vols dans quelques jours.
Parce que les maraîchers n'ont pas compris pourquoi ils ont dû attendre le 24 mai pour reprendre leurs activités (limitées) alors les centres commerciaux ont repris le 11 mai.
Parce que les coiffeurs, eux non plus, n'ont pas compris le deux poids deux mesures qui leur était affublé.
Parce que les parents ne comprennent pas pourquoi on parle maintenant de faire rentrer les maternelles, 1ère et 2e primaires le 2 juin en disant d'un côté que des pédiatres le recommandent, mais en entendant les virologues craindre que les petits deviennent ensuite dangereux pour les plus fragiles.
Parce que personne ne comprend pourquoi le Ministre de l'Intérieur dit qu'un nouveau lockdown est impossible et qu'un infectiologue dit le contraire le lendemain.
Parce que les familles ne comprennent pas pourquoi elles doivent limiter au strict minimum leurs relations quand tout le monde se croise dans les magasins et au boulot.
Parce que tout le monde attend toujours une explication sur le fait que les maisons de repos ont été laissées à l'abandon au début de la pandémie.
Sur un plan scientifique, en dépit du nombre très élevé de décès et les critiques justifiées sur la gestion des masques et du testing, il semble que l'on puisse dire que la stratégie de confinement-déconfinement a été relativement adéquate en Belgique (notamment en comparaison avec d'autres).
Rayon communication et pédagogie par contre, la Belgique a juste été pareille à l'image qu'elle dégage depuis des années au niveau politique: un foutoir cacophonique qui a oublié de donner du sens aux décisions prises par un aréopage trop souvent coupé des réalités.