La nomination d'Adrien Dolimont pour remplacer Jean-Luc Crucke au gouvernement wallon en tant que ministre du Budget c'est la surprise du chef Georges-Louis Bouchez.
Enfin plutôt une demi-surprise.
Cette arrivée est en fait surtout étonnante parce que le poste de Crucke est capital dans l'exécutif régional. Avec des responsabilités énormes.
Imaginez : les conséquences de la crise du Covid et des inondations, les finances wallonnes sont en pleines turbulences. Le gouffre s'annonce abyssal. Et le gérer dans les années qui viennent va requérir de la part du ministre du Budget un travail colossal et d'une complication sans nom. La question est de savoir si Adrien Dolimont, en dépit de son expérience de gestionnaire d'une petite commune rurale, aura les épaules assez larges pour tenir la distance et gérer la pression. On le dit pétri de talent, reste à voir si cela sera suffisant pour remplacer une bête politique aussi expérimentée que Jean-Luc Crucke.
Mais l'intronisation du ministre Dolimont est aussi facile à comprendre sur la plan stratégique.
D'abord, parce qu'avec le départ de Crucke, le Hainaut n'était plus représenté dans aucun exécutif et qu'il y a donc une logique d'équilibre territoriale à respecter. Oh bien sûr, on aurait pu imaginer que Denis Ducarme soit appelé aux responsabilités en tant que leader du MR hennuyer. Mais on sait que les relations entre lui et son président sont loin d'être au beau-fixe. Preuve encore en est la sortie du néo-carolo dans la presse ce lundi critiquant vivement Bouchez pour ses propos trop complaisants à l'égard d'Eric Zemmour.
Partant de là, le choix de Dolimont est bigrement intéressant à plus d'un titre. L'homme est jeune et représente la nouvelle génération que Bouchez veut voir s'imposer afin de donner une image renouvelée et dynamique de "son" MR. Adrien Dolimont est brillant, apprécié, populaire et issu d'une petite commune rurale. Un ministre wallon adepte de la proximité et du terroir, ça ne fait jamais de tort. Surtout quand il est carolo et qu'il sera amené, autre compétence, à piloter les aéroports wallons, dont BSCA.
Et puis surtout, politiquement, Bouchez fait d'une pierre deux coups.
D'un côté, il place à la tête des finances wallonnes un de ses boys sur qui il pourra compter de manière indéfectible, certains n'hésitant pas déjà de dire que c'est désormais le président libéral qui tient les cordons de la bourse régionale. Voilà qui va le changer du remuant Crucke dont le sens de l'indépendance libérale sociale n'était pas forcément apprécié dans les sphères présidentielles.
Et puis de l'autre, GLB résout l'épineux problème du mayorat d'Ham-sur-Heure/Nalinnes que Yves Binon ne voulait pas lâcher au profit...d'Adrien Dolimont en dépit d'un accord passé avec lui et son parti en 2018 qui devait l'amener à partir de début 2023, deux ans avant la fin de son mandat. La situation était compliquée et on se dirigeait vers une guéguerre qui aurait pu mener à une motion de défiance à l'égard d'Yves Binon, abîmant ainsi l'image du parti dans une commune très libérale à quelques encablures des élections communales. Dolimont parti de sa campagne, le MR va pouvoir justifier le fait de presque supplier Yves Binon de rester jusque 2024, pour qui cette nomination est une bénédiction. La crise latente est étouffée dans l'oeuf.
Et tout le monde est content. Ou presque. Car celle qui devait, en fonction des voix de préférence, naturellement remplacer numériquement Adrien Dolimont au Collège d'Ham-sur-Heure/Nalinnes va refuser le poste, sans doute à son grand désarroi. C'est en effet Lucie Demaret, très proche de Georges-Louis Bouchez qui devait monter dans l'attelage communal. Elle a déjà annoncé qu'elle ne le ferait pas, notamment pour ne pas être taxée de bénéficier d'un certain népotisme.
La question est donc réglée visiblement. Et la poser n'a en revanche rien d'indigne contrairement à ce que déclarait Georges-Louis Bouchez ce mardi matin.