Interview de Dominique Demonté - Directeur général d'Agoria Wallonie
Suite à une enquête de la Fédération technologique Agoria qui a interrogé près de 200 entreprises, 3 semaines après les premières mesures prises en Belgique contre le coronavirus, il apparaît que le chiffre d’affaires des entreprises technologiques a diminué de moitié par rapport au mois de mars 2019…
Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette importante diminution du chiffre d’affaires des entreprises. Il y a d’abord la demande qui a dégringolé tout comme le nombre de collaborateurs disponibles. Autre raison: les difficultés d’approvisionnement dans certains secteurs même si plus d’une entreprise sur 2 estime ne pas en souffrir pour l’instant (57%).
Pas tous logés à la même enseigne!
En moyenne, les entreprises réalisent 49,7% de leur chiffre d’affaires par rapport à la même période l’année dernière. Mais d’importantes disparités existent en fonction de la nature même des sociétés sondées par Agoria.
Ainsi, le secteur des matériaux comme les producteurs de métaux non-ferreux, les fonderies et les fabricants de produits métalliques réalisent encore presque 3/4 de leur chiffre d’affaires normal (73,2%). Ces entreprises sont classées parmi les secteurs essentiels parce qu’elles peuvent difficilement arrêter leurs productions sans endommager leurs installations. Le secteur numérique et des télécoms suit avec 66,1%. C’est un domaine dans lequel l’activité peut être maintenue grâce au télétravail comme le font plus de 9 personnes sur 10 dans ce secteur (92%).
Par contre, l’industrie manufacturière ne réalisent plus que 15,2% de leur chiffre d’affaires par rapport à l’an dernier. Pire, l’aéronautique et l’industrie aérospatiale s’écroulent et n’engrangent plus que 7% de leur CA.
Télétravail, absentéisme, chômage temporaire
Le télétravail a presque doublé. Avant l’apparition du virus, 33% des personnes travaillaient de temps à autre chez elles; elles sont maintenant 62% à le faire… Depuis le début des mesures fédérales, dans l’industrie numérique, cette part passe à 92%; dans le secteur des matériaux à 40% (au lieu de 2%) et dans le secteur de l’aéronautique et de l’aérospatiale à 55% (contre 7%).
L’absentéisme dépasse légèrement les 10% dans le secteur technologique. Il concerne surtout l’industrie manufacturière. Si près de 10% des travailleurs sont malades à la maison, seuls 1,6% des travailleurs sont absents pour s’occuper des enfants. Dans les secteurs de l’aéronautique et de l’aérospatiale, de la sécurité et de la défense, près d’un travailleur sur 5 est malade (19,7%) contre seulement 3,2% dans le secteur du numérique et des télécoms.
Pour ce qui concerne le chômage temporaire, d’importantes disparités se dégagent aussi d’un secteur à l’autre. Ainsi, dans l’industrie manufacturière, 8 travailleurs sur 10 sont en chômage temporaire. Ils ne sont que 7% dans le numérique et les télécoms.
L’enquête révèle enfin que la moitié des entreprises sondées continuent de recruter et 94% d’entre elles n’envisagent pas pour l’instant de réduire leurs effectifs.
"La moitié des indépendants risque la faillite d'ici 3 semaines"
Le SNI, le Syndicat Neutre pour Indépendants, a également effectué une enquête auprès de 10.000 de ses membres et les résultats sont également catastrophiques. 6 sondés sur 10 constatent une perte du chiffre d’affaires de plus de 50%; les autres enregistrent une perte de plus de 75%! Un indépendant sur 2 a pratiquement cessé toute activité.
« Si la situation dure plus de 3 semaines, la moitié d’entre eux risquent la faillite ou devront mettre fin à leurs activités », explique Christine Mattheeuws, la présidente du SNI qui en appelle du même coup aux autorités et réclame des mesures d’aide. « Les mesures actuellement en vigueur sont très bonnes, mais seront clairement insuffisantes », conclut-t-elle.